⛵ Projets et escapades outre-Atlantique en 2022-2023 🌎
De la Corogne à Gibraltar, par le cap Finisterre et la terre : mise à jour pré-transat !
De la Corogne à Gibraltar, par le cap Finisterre et la terre : mise à jour pré-transat !

De la Corogne à Gibraltar, par le cap Finisterre et la terre : mise à jour pré-transat !

¡ Bomdía ! – le seul mot que je connais en portugais. Je me devais de mettre à jour très rapidement mes petites news avant de « cruzar el charco », traverser la flaque, comme le disent avec ironie les Espagnols (en tout cas c’est ce qu’on m’a appris en Galice). Ce n’est pas chose facile puisque j’écris ces lignes sur mon téléphone un peu pourri, dans un bus entre Lisbonne et Séville. Pas le choix : demain matin, c’est le grand départ et si mon futur cata a vraiment l’air luxueux, je ne pense quand même pas avoir du réseau sur l’Atlantique – ça serait indécent. 

Je peine à réaliser ce que j’écris. Demain – transat. Ces derniers jours ont été une succession de stop, de bus, de BlaBlaCar et de casse tête pour arriver dans les temps à Gibraltar, plus qu’autre chose. Cette logistique saccadée ne m’a pas laissé la possibilité d’appréhender la perspective de cette transat. Tout nouveau bateau, tout nouvel équipage, wow. C’est comme si je changeais de maison et de famille en un clin d’œil. D’autant plus qu’à peine j’aurai claqué la bise à mes 5 coéquipier.es, on largue les amarres pour laisser la place dans la marina. J’arrive vraiment comme un cheveu sur le potage. On a intérêt à bien s’entendre ! Mais je le sens bien.

Mon périple de ces derniers jours a débuté à Muros en Galice, en dessous du cap Finisterre, où s’est achevé mon voyage sur Adishatz. J’étais ravie d’avoir grappillé quelques miles nautiques en plus depuis la Corogne, mais je devais me résoudre à les laisser partir : ma deadline pour Gibraltar était vraiment proche. Je l’avais bien tranquillement regardée approcher depuis mes 10 jours bloqués par le vent sur Adishatz à la Corogne, et bien sûr, qui finit à la bourre ? C’est bibi. Du moins, dans le rush.

A Coruña, la ville refuge du vent après le golfe de Gascogne

Le moins qu’on puisse dire, c’est que le vent a pas été très cool avec nous. Non, ça lui a pas suffit de nous faire subir un golfe de Gascogne au près presque tout le long (vent de face) ; c’était quand même plus marrant de continuer à souffler pendant 10 jours depuis le sud ! Donc voilà. Bloqués. En fait, c’est assez fréquent ; en ces saisons de dépressions, nombreux sont les navigateurs qui prennent leur mal en patience dans cette ville galicienne, avant de pouvoir poursuivre vers le sud. 

Et donc, c’est quoi la vie de matelote à terre ? Apéro, balades, écriture, apéro, cuisine, tris de vidéos, apéro, jeux de société (beaucoup), apéro. Oups. Il faut dire qu’un Étienne à la forme olympique ne laisse JAMAIS quelqu’un le verre vide (Étienne si tu vois ça, je trinque à ton tiponch dont tu as le secret). 

Étienne, une pâte à pizza, un verre de rouge.

Bon, à part ça, ce séjour à terre s’est parfois rythmé, trompant l’inertie propre aux longues escales imprévues. Tous les 5, on a fait une petite excursion à Saint Jacques. Ça doit être plus transcendant d’y arriver après plusieurs semaines de marche qu’en voiture louée, cependant. 

La Corogne nous a offert son lot de tortillas, une bonne vingtaine d’arcs-en-ciel, des balades vers l’océan et la tour d’Hercule (apparemment la plus vieille du monde), de super discussions à refaire le monde – particulièrement avec Nini, des The Mind endiablés le soir dans le carré, sans compter les Dixit qui nous faisaient nous connaître toujours plus les uns les autres.

On en a aussi profité pour retaper quelques trucs au bateau, et pour Nini et moi, se faire wincher en haut du mât pour vérifier que la tempête n’ait pas trop endommagé les haubans. 

Arnaud s’est fait tatouer, Étienne faisait des allers retours au ship (magasin de bateau) pour trouver des pièces manquantes, Jean-No a fini par nous convaincre d’aller manger du poulpe dans une des 50 pulpeiras de la ville, Nini m’a fait un bracelet qui m’accompagnera cette année.  

Quant à moi, je suis allée farfouiller dans la marina et ai pu faire quelques interviews de marins pour mon docu. Marins qui se sont d’ailleurs retrouvés sur Adishatz pour l’apéro la veille de notre départ (on est pas repartis très frais). 

Ciao, la Corogne. Elle m’aura bien fait comprendre qu’à voile, le temps est maître et les humains s’en adaptent. « C’est ça qu’on aime avec le bateau : il nous remet à notre place, quoi qu’on veuille », disait Arnaud.

Retour à la mer pour le cap Finisterre

On quitte finalement la terre samedi matin, profitant d’une accalmie pour reprendre le large. 

Quel bonheur de retourner en mer. De la sentir reprendre possession de tous nos sens, de se faire secouer à la guise de la houle. Très vite, une certaine lucidité propre à la navigation reprend ses droits. La brume de l’escale s’estompe brusquement, nous laissant affûtés, contemplatifs, aux aguets. La mer donne sa juste place aux silences.

Attirés par la transe que pose Arnaud sur les enceintes du bateau, les dauphins se montrent très vite, plus longtemps, plus nombreux, toujours souples et majestueux. Cette fois-ci, je dégaine mon Fuji. 

Dimanche, on passe le cap Finisterre. Enfin. Adishatz, en fier destrier, chevauche furieusement les vagues.

Mais il faut se remettre à l’abri : dans la nuit, des énormes rafales ne laisseraient pas un Adishatz sur coque. On noue les amarres à Muros, charmant village niché dans une ría galicienne. jouissance de découvrir un endroit par la mer, comme les explorateurs d’autrefois.

Adishatz Adishatz

Et enfin je réalise, en serrant les pointes : c’est la fin pour moi. La Corogne avait endormi toute conception d’une fin sur Adishatz. Mais il faut se résoudre à l’évidence : soit je poursuis jusqu’aux Canaries avec mon équipage légendaire et je cherche un autre bateau pour traverser, soit je me tiens à mon plan initial et dois partir maintenant sur la terre pour Gibraltar. Je reste sage. Tant d’autres aventures m’attendent aux Antilles. 

Mais mon coeur est si lourd ! Le soir, Étienne nous sort une bouteille de champagne, que j’ai l’honneur de sabrer pour marquer le passage du Cap et mon départ. On flambe des bananes. Adishatz a un goût de fête, et pour moi, de fin. 

Le lendemain, j’écris des mots doux à mes compagnons si singuliers et packe mon sac monstrueux. Gifle. Ça sera moi seule maintenant. Des au revoir mouillés, des rêves de retrouvailles.

Adishatz largue les amarres. Quel profond déchirement de voir le bateau tranquillement s’éloigner au loin depuis la terre. Je déverse toutes mes larmes, jusque là contenues. Quel extraordinaire baptême de nav. Il ne me quittera plus jamais, laisse une marque indélébile. Je le sais, Adishatz, avec Étienne, Arnaud, Jean-No et Nini auront été le début d’une longue histoire sur les voiliers. Je reviendrai Étienne, c’est sûr, attends moi quelque part !

À bientôt Adishatz <3

Course contre la montre : de Muros à Gibraltar

Sans trop de transition, c’est parti. Je brandis mon pouce et termine le soir chez Paula, une chanteuse espagnole d’une grandeur de cœur incroyable qui m’invite à dormir chez elle quelques instants après m’avoir accueillie dans sa voiture avec son amie Lucia. Le soir, cette dernière m’emmène dans une célébration aux morts (c’est Halloween !) dans une galerie d’art tenue par une Argentine assez perchée qui voue un culte aux chèvres. J’adore le stop.

Gracias Paula

Bus, bus, BlaBlaCar… Les jours suivant sont surtout un casse tête logistique pour que je puisse arriver à temps. Je rencontre des gens super, tous plus bienveillants et au cœur ouvert. Je prends des contacts, donne des Instagram, échange des histoires.

Alma, un prof de yoga Indien à Porto qui dessine

J’arrive à Lisbonne le soir, où je me résous à l’expérience de dormir dehors (toutes les auberges sont complètes ou hors de prix et mes recherches de canapé n’ont pas abouti). Mais… Appel à une amie ! Ju, une amie de Charly de longue date, me donne un coup de pouce au téléphone et me dégote un hébergement via son compte couchsurfing chez Jonas, un Tanzanien super sympa – chez qui j’arrive à 00h30 en plus…

Le lendemain, je me balade dans Lisbonne (après avoir payé un rein pour laisser mon sac bien trop lourd dans un locker (il faudra vraiment que je balance des trucs parce que c’est intenable)) et monte dans un bus réconfortant pour Séville. Demain avant l’aube, je chope un BlaBlaCar pour Gibraltar. I did it. 

Bref, ces derniers jours ont été bien rushés. Ils ne m’ont pas laissée commencer mon taff pour Econogy, qui s’est précisé par des coups de fil avant de repartir de la Corogne. D’ailleurs, je ne serai pas en service civique. Longue histoire courte, mon projet n’est pas compatible avec les exigences réglementaires propres aux SC. Un autre statut est possible, qui m’indemniserait quelques frais. On va se serrer la ceinture ! J’aurai du boulot en arrivant aux Antilles. À suivre. 

Vous l’aurez peut-être senti, cet article se veut surtout être un hommage à Adishatz et aux humains qui le peuplent actuellement. Sans trop digérer encore ce qui m’arrive, ces mots marquent la fin d’un aventure et le début d’une nouvelle. C’est partii pour une transat à la voile.

À bientôt, prenez tous/tes soin de vous, et même si j’ai pas de réseau sur l’océan, ça me ferait extrêmement plaisir de découvrir des petits messages de nouvelles en arrivant de l’autre côté. ☀️

Adishatz !! (Je l’ai trop écrit) 

*(pour mémoire, ça veut dire au revoir / à bientôt / adieu / bonjour, en gersois) 

6 commentaires

  1. PETITA

    Merci ma chérie, tu as une réelle plume : je me régale et je reçois en plein dans la figure, tes émotions, comme un gros coup de vent…… moi qui ai un mal de chien à quitter ! Que de rencontres déjà faites! et dire que ce n’est qu’un début…. le monde est plein d’hommes et de femmes, de paysages, à découvrir …..
    Petite matelot aguérri : bonne traversée, je t’envoie plein de bonnes ondes

  2. Levyfve

    Oh là là j’avais l’impression de quitter Adishatz avec toi! et j’étais même à deux doigts de verser ma larme! merci à ce bel équipage de t’avoir fait vivre une si belle première experience en mer, d’ailleurs j’ai peut etre loupé un épisode mais tu nous avais fait miroiter une petite présentation de Jean No que je ne crois pas avoir lue?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *