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Une première nav : traversée du golfe de Gascogne
Une première nav : traversée du golfe de Gascogne

Une première nav : traversée du golfe de Gascogne

Yiiiiha ! Golfe de Gascogne, c’est done. Je me devais de conter cette incroyable première navigation qui a duré quatre jours, mais qui en a semblé pourtant tellement plus… J’écris depuis la Corogne en Espagne, où on est venus se réfugier pour quelques jours à cause d’une vilaine dépression qui nous laissera décidément pas descendre plus au sud ! Peut-être même que cette traversée restera la seule aventure en mer avec Adishatz et l’équipage, à voir dans les prochains jours.

Je vous emmène dans les ressentis de mes premiers mémorables jours de nav en m’appuyant sur mon carnet de bord et mon polarstep, même si ma prise de note a été (bien) réduite par le mal de mer.

Temps forts de la traversée

Dimanche, c’était le grand départ à 9h. Après une dernière douche à la marina, Etienne (le capitaine) nous explique des mesures de sécurité, on s’attelle aux derniers préparatifs, puis c’est parti : Adishatz prend le large. On barre quelques heures pour sortir de l’estuaire de la Loire, puis l’agitation de la mer prend la suite du calme fluvial. Vous contextualisez ? Je vous emmène dans les moment qui m’ont le plus marquée.

Lundi, 8h30 : premier réveil en mer. Si le gite est éprouvant la journée, il me berce comme un nourrisson la nuit : je suis en pleine forme. Je monte sur le cockpit où l’équipage est déjà levé. Je regarde les gris du ciel, respire les embruns et m’émerveille de ce paysage qui change toujours selon la lumière et la météo. On est partis, quoi.

Mardi, 17h : pétole. La mer est calme et le soleil nous déleste de nos couches de vêtements habituelles. Sans gite, j’en profite pour écrire mon carnet de bord sur le pont, Nini lit, Etienne s’affaire à une réparation technique, Arnaud fait des étirements, Jean-No sieste. J’ai profité de ce moment de répit pour faire ma première toilette.

Mercredi, 6h : tempête au large du cap Ortegal. Je me fais sortir de mon sommeil par un vacarme ahurissant : le bateau craque, les voiles claquent dans tous les sens. Je soulève le tissu qui sépare notre cabine du reste du bateau, et j’aperçois Arnaud et Etienne qui courent de partout dans le cockpit à la lumière de leurs frontales, sous la pluie. Les éclairs strient le ciel. C’est la tempête, je palpite !! Je m’habille en vitesse en essayant de pas me prendre chaque mur et je fonce dehors. C’est un beau bordel : on le sait pas encore, mais une écoute s’est fait la malle et claque au vent (une écoute c’est un cordage, donc l’équivalent d’un fouet quand il s’échappe), et la bosse d’enrouleur du génois est cassée. On se fait petites avec Nini pour pas gêner l’urgence (on pouvait pas bien être utiles). Je suis toute heureuse d’assister à ma première tempête. « Va mettre un gilet toi, parce que si on chavire… » me lance calmement Etienne, fidèle à sa tranquillité légendaire. Je ris. La tempête s’est calmée mais ç’a été sportif ! Dire que une heure avant, Etienne et Arnaud se sauçaient puisqu’ils avaient anticipé la tempête… En mer, un petit problème peut vite en devenir un très gros.

En fait, on s’est fait prendre dans la dépression qu’on cherchait à éviter en speedant pour rejoindre la Corogne. Ce dernier jour de navigation s’est soldé par une nav au moteur et l’attente de la côte, pourtant si proche, qu’on a dû rejoindre en tirant des bords (en zigzagant pour ne pas se prendre le vent de face). On a fait notre baptême des 40 nœuds en même temps que Jean-No, qui a pourtant son propre bateau et qui navigue beaucoup, la classe 😎

Arnaud et une succession d’arc-en ciels post-tempête

Mercredi, 9h : dauphins. Petite accalmie. Le ciel tourmenté est magnifique et se décline en un extraordinaire camaïeu de gris, jaune, bleu. Les dauphins arrivent. Je frappe mon mousqueton sur la ligne de vie et je cours sur le pont pour les voir. J’essaie de tenir debout, je suis trempée par la mer, mais qu’est ce que ça en vaut la peine ! Les cétacés nagent devant la proue, agiles, furtifs, glissants. Je suis en extase. A ce moment-là, je tiens exactement la raison qui m’a poussée à entreprendre cette aventure : ce sentiment grisant de liberté.

Mercredi 19h30 : arrivée à la Corogne. Enfin ! On a regardé la côte toute la journée sans que le vent nous permette de la rejoindre en ligne droite. On largue les amarres dans la marina et on ira à notre première douche salvatrice, après l’apéro, bien sûr. C’est la première fois que j’arrive dans un pays étranger par la mer. J’adore.

Jean-No hisse le pavillon espagnol

Immersion sur Adishatz

Le temps

En mer, le temps s’écoule différemment. Les repères temporels fixés par l’agitation tourmentée de la vie quotidienne s’estompent pour laisser place à l’infinitude de l’horizon. Pas de réseau, pas d’heure à part pour les quarts de nuit, rien à faire, personne à voir à part l’équipage. Et qu’est-ce que c’est cool. Vivre l’instant et s’accorder aux besoins du bateau : les voiles, les réparations et problèmes techniques, le cap… Pas grand chose pour presser le temps. « En plus de la liberté sur un bateau, tu es maître du temps. Maître horloger », s’amuse Etienne un matin, lorsqu’il se souvient qu’il changeait l’heure à sa guise au cours d’une transat. Le rythme est dicté par les repas, les siestes et les quarts de nuits. Un tout autre rapport au temps s’installe.

Le mal de mer

Les premiers jours se résument à fixer l’horizon pour Nini et moi, qui tentons de combattre le mal de cœur provoqué par notre première sortie en mer. En fait, c’est pas super juteux, vu comme ça. On se restreint au périmètre du cockpit : impossible de rester longtemps dans le carré, sans voir l’horizon. L’intérieur, c’est l’épreuve du feu. Tu sens 10x plus le gite et le tangage du bateau. Chaque passage aux toilettes est une expédition. Je manque de rendre mon dîner à chaque fois que je me tortille pour me déshabiller avant de dormir. Etienne, Jean-No et Arnaud sont aux petits soins avec nous, cuisinent et nous apportent dehors ce dont on a besoin. Des amours. Mais globalement, ça va, je m’attendais à bien pire ! Le troisième jour j’ai même réussi à cuisiner et à faire la vaisselle, j’étais pas peu fière.

Nini - 0, mal de mer - 1
Nini – 0, mal de mer – 1

Guerrière que je suis, je vomis pas. Nini, elle, succombe au deuxième jour. Etienne nous promet que quelques jours plus tard, on pourrait tranquillement jouer aux cartes dans le carré. Sur le coup ça me parait tellement hors de portée !! Je m’accroche à ses paroles et je retourne à mon unique occupation : fixer les horizons.

Sans trop m’avancer, je dirais que je suis amarinée à 70%. Youhou. Et le fait de rester à quai ne remet pas les compteurs à 0, c’est comme le vélo !

Un quart de nuit

Il est 6h03, j’ai du Rone dans mon casque. J’ai le quart de 5 à 7 h cette nuit, royal. Tous les jours, au soir, on se partage la nuit en tranches de 2 heures pour les quarts de nuits. En gros, c’est rester éveillé.e et checker qu’on va s’aplatir sur aucun bateau. Tous les quarts d’heure, je jette un œil à l’horizon, derrière le génois. Si un bateau arrive dans notre champ de vision, et que sa trajectoire croise la nôtre, on a 15 mn pour l’éviter.

On est quelque part dans la diagonale entre Nantes et la Corogne, l’angle de l’Espagne. Une demi-lune dessine des reflets fuyants sur l’eau noire. De l’autre côté, le ciel est plein d’étoiles. Adishatz file à 7 nœuds, le vent est de travers, on trace. Le génois, immense, est presque aussi tendu que la grande voile. Le mouvement est élégant, fluide, tout comme les bruits coulants des flots fendus. Au début de la nuit, ils étaient parsemés de plancton scintillant qui faisaient ressembler nos vagues à des pluies étoilées. C’était absolument magnifique.

J’aime ces moments si particuliers et intimes sur le bateau où on se retrouve seule, avec la mer, le vent et le bateau, à moitié réveillée, à scruter l’obscurité de la nuit et à laisser ses pensées vagabonder au gré des vagues.

Un détail primordial : manger

Manger sur un bateau, c’est sacré ! On confectionne des petits menus alléchants avec l’équipage (-1 : Arnaud a commencé un jeûne juste avant d’embarquer, ce fou !). Aux menus : risottos, fajitas, dahls, woks de légumes… On mange pas de viande – Nini est végé – et on se régale.

Fajitas !

Le vocabulaire de la voile

On apprend tout plein de vocab dès les premiers jours, où nos trois « oncles » nous font activement contribuer à la vie du bateau. Choquer / border les écoutes de voiles (= tendre plus ou moins les voiles), loffer ou abattre (changer de cap en collant plus ou moins le vent), être au près ou au portant (avoir le vent devant ou derrière soi), la liste est si longue… En tous cas, c’est confirmé : j’adore la voile et je suis ultra curieuse de m’expérimenter. Je découvre tout un univers et les humains qui le composent…

Les couchers de soleil

Pas besoin de description : les photos suffiront

Le bateau

Adishatz, c’est comme un être vivant. Un membre à part entière de l’équipage. On en parle comme s’il avait une âme. Il est toujours à écouter, à dorloter, jamais à négliger. Il nous remet à notre place, nous soude, nous guide, nous abrite. Je découvre ce rapport particulier d’un capitaine à son bateau. Homme-bateau, bateau-homme, comme dirait Bernard Moitessier, une idole des navigateurs dont on a écouté un podcast ensemble en mer.

L’équipage

Vivre en mer, c’est vivre en espace restreint avec des inconnus. C’est une expérience ultra intéressante, où chacun doit trouver son espace et prendre ses marques. Je suis ultra bien tombée. Étienne, 63 ans le capitaine, sa malice, son calme et sa bienveillance. Nini, 23 ans chouette fille ultra intéressante avec qui je m’entends super bien. Arnaud, 48 ans, connecté à la terre, plein de discussions intéressantes et bourré d’humour. Jean-No, 62 ans, une boule de bienveillance et d’attention dont on fait souvent la psychanalyse… Le vécu de chacun est de moins en moins obscur chaque jour. L’ambiance à bord est excellente et j’appréhende déjà les au revoir – ou les adishatz…

Nini

Bien qu’on ne soit plus en mer (et qu’il me taaaarde de la reprendre), l’aventure continue à terre à la Corogne. J’écrirai un autre article sur nos sortes de vacances espagnoles improvisées par la météo et sur chacun des membres de l’équipage, il y a beaucoup à raconter sur la fluidité et la richesse de l’ambiance à bord.

Aussi, je devrai improviser la semaine qui s’annonce en fonction de la météo, pour être à temps à Gibraltar début novembre pour prendre mon deuxième bateau… To be continued. Adios !

11 commentaires

  1. Chérie, merci de nous partager ces aventures qui démarrent. On a plaisir à te lire et on se sent un peu sur Adishatz avec vous, et à kiffer avec toi. Ces couchers de soleil ! tu dois être heureuse… On te retrouve jusqu’à tes expressions favorites (y compris ce « de partout » que j’ai décidé de ne pas corriger 😊). Ne manque plus que la vision de toi en train de triturer ta boucle de cheveux ! 😉

  2. Lélé

    coucou maowww, ça fait très plaisir de te lire et de voir que tu es épanouie, à fond dans cette nouvelle aventure qui a l’air palpitante.
    Btw tes photos sont incroyables, comme d’habitude. Hâte de te lire <3
    lélé

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